1. Introduction
La réflexion que nous présentons dans les pages suivantes est centrée sur la traduction d'un des éléments constituants du péritexte des articles journalistiques : les titres. Ces segments courts, qui fonctionnent sémantiquement comme une entité complète, constituent des unités intéressantes du point de vue traductologique, car leur polyfonctionnalité et leur valeur cataphorique exigent une construction de sens complexe et nécessairement rétroactive de la part du traducteur.
L'étude prend appui sur un corpus constitué de 179 titres d'articles publiés dans le mensuel français Le Monde Diplomatique et leur traduction en espagnol parue dans l'édition espagnole de cette publication. Il s'agit d'un mensuel qui jouit d'un grand prestige par son influence et sa diffusion internationale.2
Afin de construire un corpus homogène du point de vue générique, nous avons limité notre analyse aux titres qui ouvrent des textes appartenant à un genre discursif de la presse écrite : l'article journalistique. Nous en avons donc écarté d'autres genres comme l'éditorial ou le reportage, dont la traduction pourrait répondre à d'autres paramètres.
À notre avis, l'intérêt de ces documents du point de vue de la traduction réside dans leur condition de textes qui combinent des marques visuelles (au niveau de la typographie et de la segmentation du texte) et des organisations discursives de type explicatif et argumentatif qui ne sont pas toutes directement transposables en espagnol (cf. Fernández et Lorda, 1999).
Le choix des titres comme objet d'étude est déterminé par le fait que ces segments sont appropriés comme unités de traduction, car ils permettent de bien délimiter la comparaison entre le texte de départ et le texte d'arrivée (Toury, 1995 ; Nord, 1998). En plus, les titres constituent des segments textuels complexes, à cause de leur polyfonctionnalité à plusieurs niveaux de l'organisation discursive. En effet, comme le signale C. Nord (1998 : 177), les différentes fonctions remplies par les titres peuvent se rapporter aux fonctions de base du langage :
- Fonction informative (annoncer le sujet qui va être développé dans l'article) ;
Les titres fonctionnent donc comme une entité sémantiquement complète et polyfonctionnelle dans la culture de départ et aussi dans la culture d'arrivée. Ces caractéristiques font de leur interprétation et ultérieure restitution un processus très riche qui sera analysé avec plus de détail dans les pages suivantes.
Le but de l'analyse contrastive est, en un premier temps, de décrire les mécanismes récurrents utilisés par les traducteurs pour rendre le sens postulé par le texte de départ avec le matériel linguistique et discursif de la langue d'arrivée. Ces mécanismes ou stratégies de traduction, qui relèvent d'un choix personnel du traducteur, rendent compte de son interprétation du texte. Dans un deuxième temps, la description des stratégies de traduction appliquées devrait nous permettre de cerner la stratégie de traduction générale qui oriente la démarche globale des traducteurs à l'égard des titres à traduire.
Même si l'objectif de notre analyse traductologique n'est pas de fournir des données quantitatives, nous allons préciser tout de même la fréquence d'apparition des stratégies observées, en décrivant cette fréquence comme « dominante » ou « secondaire ». En effet, nous avons décelé des régularités indicatives de tendances de traduction très nettes : les choix de traduction observés dans le corpus peuvent s'inscrire dans une échelle qui oscille entre des solutions qui reflètent le texte de départ d'une façon littérale ou presque et d'autres qui n'ont pas de rapport de conjonction totale avec le texte de départ (modulations, modifications et mutations selon le degré d'éloignement sémantique ; Van Leuven-Zwart, 1990). Le schéma suivant résume les catégories établies :
- Intervention du traducteur | - TRADUCTIONS LITTÉRALES
ET PRESQUE LITTÉRALES (dominantes) -
TRADUCTIONS NON LITTÉRALES (secondaires)
- Modulations
-
Modifications
- Addition de guillemets
-
Changement d'un acte de parole
-
Transformation de la structure bimembre du titre de départ
|
+ Intervention du traducteur | - - Mutations : Changement radical de sens
|
Schéma nº1 : L'intervention des traducteurs dans le corpus analysé
I. TRADUCTIONS LITTÉRALES ET PRESQUE LITTÉRALES
Ces occurrences, majoritaires dans le corpus analysé, correspondent à une traduction littérale du titre français. Nous citons quelques exemples :
(4) Double piège pour l'Afghanistan (février 1999)
Doble trampa para Afganistán (febrero 1999)
(5) Quand les pauvres séduisent les banques (avril 1999)
Cuando los pobres seducen a los bancos (abril 1999)
Dans ce type de cas, il n'y a pas de divergence entre le segment de départ et le segment d'arrivée, parce que le rapport entre les deux peut être décrit exclusivement en termes de conjonction.
Nous avons décelé aussi d'autres traductions presque littérales où un élément du titre français subit une très petite modification, mais sans changement de sens global ; ainsi, dans quelques titres, un terme au singulier est traduit par un terme au pluriel :
(6) La vague du chômage déferle sur la Chine (janvier 1999)
Las olas del paro rompen sobre China (enero 1999)
ou bien le traducteur a ajouté une détermination absente du texte de départ :
(7) Histoire secrète des négociations de Rambouillet (mai 1999)
La historia secreta de las negociaciones de Rambouillet (mayo 1999)
Ces traductions littérales et presque littérales, qui constituent la modalité la plus fréquente dans le corpus analysé, peuvent se situer au niveau inférieur d'intervention du traducteur. Elles montrent que le traducteur a jugé qu'il pouvait respecter les particularités structurelles et formelles du texte source. Comme l'affirme María José Hernández Guerrero dans une étude sur la traduction de titres journalistiques appartenant à des genres discursifs divers : «En un alto porcentaje los títulos de los artículos argumentativos se traducen literalmente, las modificaciones que se producen son mínimas y, en su mayoría, debidas a las exigencias de la nueva situación comunicativa. [...] Influye en esta fidelidad el respeto a la voluntad del autor original, pero también el hecho de que, en francés, las normas de titulación de estos textos son muy similares a las de nuestra lengua (Hernández Guerrero, 2004 : 279-280)».
Le fait que ces traductions soient nettement les plus fréquentes suggère que la stratégie globale de traduction consiste à prioriser le principe d'adéquation : les traducteurs ont choisi d'importer dans le texte traduit les éléments linguistiques et culturels propres au texte de départ. Mais les exemples les plus intéressants, comme nous allons le voir ensuite, sont ceux où les traducteurs, sans y être linguistiquement contraints, choisissent volontairement de s'écarter du texte source.
II. TRADUCTIONS NON LITTÉRALES
● MODULATIONS
Les modulations apparaissent lorsque le choix de traduction a un rapport hyperonymique avec le texte de départ : la traduction développe un aspect syntactique, sémantique ou stylistique de disjonction (plus général) tout en gardant certains liens de convergence. Dans le corpus analysé, presque toutes les modulations sont de type sémantique, comme l'illustrent ces deux exemples :
(8) Controverses passionnées à propos des sectes (mai 1999)
Polémicas en torno a las sectas (mayo 1999)
(9) Les pays du Sud rongés par les pesticides (avril 1999)
Los países del sur víctimas de los pesticidas (abril 1999)
Dans ces deux cas, quelques choix dénominatifs des traductions sont plus généraux du point de vue sémantique que leurs correspondants français (« controverses passionnées » et « polémicas » dans 8; « rongés » et « víctimas » dans 9). Cette stratégie se traduit par une perte de précision et d'intensité sémantique qui réduit la charge émotionnelle des titres espagnols.
● MODIFICATIONS
Les modifications apparaissent lorsque la solution de traduction montre un rapport contrastif avec le texte de départ, mais justifiable par une hypothèse interprétative. Nous avons établi les catégories de modifications suivantes :
○ Addition de guillemets
○ Changement d'un acte de parole
○ Suppression d'un élément locatif
○ Transformation de la structure bimembre du titre de départ
Comme nous allons le voir, ces stratégies de traduction répondent toutes à une même logique : « normaliser » le titre de départ pour obtenir un titre plus conventionnel et naturel pour les lecteurs espagnols.
○ Addition de guillemets
Dans les occurrences regroupées ici, la traduction espagnole incorpore un terme ou une expression entre guillemets qui ne sont pas présents dans le texte de départ. Ce titre et sa traduction en constituent un bon exemple :
(10) Amère victoire pour les mineurs roumains (février 1999)
Amarga «victoria» para los mineros rumanos (febrero 1999)
Dans la traduction espagnole, la fonction principale de ce signe de ponctuation est d'expliciter une distance énonciative par rapport au terme entre guillemets. L'addition des guillemets dans la traduction implique un doute jeté sur la justesse ou la précision du terme (dans 10, les guillemets fonctionnent comme renforcement de l'adjectif « amarga » qualifiant « victoria » ; cf. supra). Il s'agit donc d'une interprétation corrective de la part du traducteur, indicatrice de l'apparition d'une nouvelle voix et d'un nouveau point de vue.
Dans d'autres exemples, moins fréquents dans le corpus, la fonction des guillemets ajoutés à la traduction est de marquer l'emploi d'une association créative ou surprenante, propre au caractère plus rhétorico-ludique de la presse française :
(11) Journalistes à tout faire de la presse américaine (février 1999)
Periodistas «para todo» de la prensa de Estados Unidos (febrero 1999)
Dans ce cas-là, le signe de ponctuation marque dans la traduction une expression surprenante ou peu habituelle pour les lecteurs espagnols (« Journalistes à tout faire », une expression issue de « bonne à tout faire »). Il s'agit donc d'un « commentaire » textuel de la traduction.
○ Changement d'un acte de parole
L'analyse du corpus fait apparaître quelques occurrences où l'acte de parole du segment de départ, une exclamation ou une interrogation rhétorique, est rendu en espagnol par une assertion. Cette intervention implique, en tous les cas, une perte de force énonciative dans le titre espagnol, comme dans les exemples (12) et (13) :
(12) Danger, prolifération étatique ! (février 1999)
El riesgo de la proliferación estatal (febrero 1999)
(13) L'alliance du Macklemboug fera-t-elle école ? (mars 1999)
La alianza de Mecklemburgo como ejemplo (marzo 1999)
Le recours à l'exclamation dans (12) et à l'interrogation dans (13) constitue une stratégie qui vise à atteindre l'implication du lecteur français. Dans ces exemples, le sujet d'énonciation se trouve émotionnellement impliqué dans le contenu de l'énoncé. En revanche, les titres espagnols sont moins marqués énonciativement, moins emphatiques et donc moins proches du lecteur.
Dans quelques cas, à la perte de force énonciative dans la traduction s'ajoute un éloignement sémantique plus grand entre le texte de départ et son correspondant espagnol. Observons, par exemple, ce titre et sa traduction :
(14) La Belgique survivra-t-elle aux élections de 1999 ? (juin 1999)
El sistema belga en crisis generalizada (junio 1999)
Nous pouvons voir ici que l'éventail de possibilités interprétatives ouvert par l'interrogation est stabilisé dans la traduction par une assertion orientée vers la négativité absolue : « crisis generalizada ». Cette traduction implique une vraie prise de position de la part du traducteur, qui a construit un texte à partir de paramètres sémantico-pragmatiques différents, probablement à partir de la lecture de l'article en entier.
○ Transformation de la structure bimembre du titre de départ
Cette rubrique regroupe les titres où la stratégie de traduction appliquée implique la transformation d'un titre bimembre en français en titre unimembre en espagnol. Voici quelques exemples de cette modification syntactico-pragmatique :
(15) Libre-échange, la dernière Bastille (janvier 1999)
El librecambio como último reducto (enero 1999)
(16) En Israël, l'enjeu séfarade (mars 1999)
El problema sefardí en Israel (marzo 1999)
(17) Guatemala, après l'enfer (avril 1999)
Guatemala después del infierno (abril 1999)
Ces exemples illustrent l'importance de la prise en compte du genre discursif pour la traduction des titres de presse. En effet, le genre discursif pèse sur les décisions du traducteur qui vise à l'acceptabilité de la traduction dans la culture d'arrivée. Selon M. J. Hernández Guerrero : « Las normas que imperan en la construcción de los distintos géneros periodísticos en español tienen un peso muy importante en las decisiones traslativas que se toman con los titulares [...] (Hernández Guerrero, 2004 : 276) ».
Les titres bimembres constituent une modalité très habituelle en français pour les articles journalistiques de type argumentatif, tandis qu'en espagnol ils sont moins utilisés (Hernández Guerrero, 2004 : 278). Parmi les stratégies qui permettent aux traducteurs d'obtenir un titre unimembre en espagnol, il faut souligner la suppression d'un élément locatif du texte source. La fonction de cet élément est d'aider le lecteur à situer l'article dans le cadre géographique mondial sans avoir besoin de lire le texte en entier ; citons deux exemples :
(18) A Berlin, face à face des intellectuels de l'Est et de l'Ouest (mars 1999)
Cara a cara de los intelectuales del Este y del Oeste (marzo 1999)
(19) En Turquie, procès au peuple kurde (juin 1999)
Proceso al pueblo kurdo (junio 1999)
Placé toujours en début de titre par l'organisation textuelle du français, cet élément locatif fonctionne comme un « marqueur d'univers de discours » (Adam, 1990 : 62), car il ouvre un espace sémantique où le lecteur doit encadrer l'interprétation (dans les exemples 18 et 19 : « Berlin » et « Turquie »). La suppression du traducteur implique non seulement l'élimination dans le titre espagnol d'une guide qui facilite la localisation spatiale de l'article, mais aussi la neutralisation des éventuelles inférences que le lecteur puisse juger valables dans cet espace sémantique. En outre, cette intervention du traducteur peut être mise en rapport avec les traditions journalistiques de chaque culture : la suppression de l'élément locatif constitue une stratégie très simple pour obtenir un titre unimembre, plus naturel en espagnol.
● MUTATIONS
Cette catégorie correspond aux glissements de sens qui éloignent la traduction espagnole du texte de départ à tel point que le rapport d'« équivalence » est dilué. La fréquence d'apparition de ce type de traductions est nettement moins nombreuse que celle des catégories précédentes.
Ces divergences, qui peuvent se situer au niveau supérieur d'intervention du traducteur, sont celles qui font mieux apparaître les stratégies appliquées pour adapter les versions espagnoles aux nouvelles conditions de la culture d'arrivée. Dans beaucoup de cas, il est même possible de parler d'adaptations plus que de traductions, par la présence d'écarts de sens difficiles à expliquer.
Nous avons classé les mutations en deux grands groupes qui partagent une même logique : la volonté de « normaliser » le titre français et de le rendre plus acceptable pour la culture d'arrivée. Dans le premier groupe, la stratégie de traduction consiste à remplacer un titre subjectif par un titre plus objectif, qui résume le contenu de l'article d'une façon beaucoup moins affective (Gómez Montpart, 1982 : 109). Les titres suivants illustrent ce choix de traduction :
(20) On ne se prostitue pas par plaisir (février 2003)
Las causas económicas y sociales de la prostitución (febrero 2003)
(21) En Iran, islam contre islam (juin 1999)
Irán como referente para el mundo musulmán (junio 1999)
Dans l'exemple (20), le choix français est un titre percutant en forme d'affirmation catégorique dans laquelle le sujet d'énonciation se trouve émotionnellement impliqué, tandis que, dans la version espagnole, l'information est exposée d'une façon plus neutre. Et dans l'exemple (21), le titre espagnol non seulement constitue une formulation nettement moins créative, mais il implique aussi une atténuation de l'émotion véhiculée par le titre français.
Dans le deuxième grand groupe de mutations, le titre français offre une information précise et idéologiquement marquée, qui est rendue en espagnol d'une façon plus générale :
(22) Chantage nucléaire en Corée du Nord (février 2003)
Una crisis previsible y evitable (febrero 2003)
(23) La gauche allemande paie ses hésitations (mars 1999)
Fulgor y retirada de la izquierda (marzo 1999)
(24) À Bruxelles, une Commission chasse l'autre (mars 1999)
La UE sigue al margen de los ciudadanos (marzo 1999)
Ces trois exemples partagent la suppression dans la traduction des éléments locatifs (« Corée du Nord », « allemande », « Bruxelles ») et la récupération de l'information par le biais d'expressions plus générales. Dans les trois versions espagnoles, le traducteur a proposé un titre moins précis qui, plus général, a plus de chances d'intéresser le lecteur espagnol et de l'inciter à lire l'article. Il s'agirait donc d'une autre façon d'« approcher » le titre aux destinataires espagnols.
Bien que les versions espagnoles de cette catégorie présentent toutes un éloignement sémantique très grand par rapport au titre français, on peut affirmer qu'elles partagent aussi une caractéristique commune : les titres espagnols sont moins percutants et créatifs que les français.
4. Conclusion
Les titres des articles journalistiques sont des segments courts et polyfonctionnels. Ils constituent un espace discursif complexe où se retrouvent des éléments de nature diverse (informatifs, idéologiques, culturels). Dans le cas du Monde Diplomatique, les titres synthétisent d'une façon créative, percutante et idéologiquement marquée les positions qui seront étayées ou réfutées par les auteurs.
Le processus de traduction d'un texte met toujours en place une « tension » entre les structures linguistiques et discursives propres à la culture de départ et celles de la culture d'arrivée. L'analyse contrastive de notre corpus, constitué par 179 titres d'articles de ce mensuel français et leurs traductions espagnoles, a montré un large échantillon de stratégies de traduction qui soulignent le poids de la culture de départ pour orienter la démarche globale des traducteurs. En effet, les traducteurs ont choisi majoritairement de respecter les particularités des titres français et ces traductions littérales constituent la modalité la plus fréquente et la moins perturbatrice du point de vue sémantico-pragmatique. On peut affirmer donc que, dans la traduction des titres de notre corpus, les considérations d'acceptabilité dans la culture journalistique d'arrivée ont cédé le pas aux considérations d'adéquation.
Cependant, l'intervention des traducteurs dans notre corpus n'est pas homogène, car nous avons trouvé d'autres occurrences, moins fréquentes, qui montrent que l'acceptabilité a été mise au premier plan. Dans ces cas, les traducteurs ont supprimé de façon presque systématique les marques propres au genre en français pour obtenir un titre qui soit le plus naturel possible en fonction des conventions discursives de la culture d'arrivée. Ainsi, ils ont pratiqué des manipulations diverses (modulations, modifications et mutations) afin de « normaliser » la traduction des titres et les rendre adéquats à ce qui est considéré un titre journalistique espagnol. On pourrait placer ces occurrences aux niveaux les plus élevés de l'échelle d'intervention du traducteur, car elles impliquent les glissements sémantico-pragmatiques les plus importants par rapport au titre original.
L'analyse des stratégies de traduction dans notre corpus a révélé que le lien entre l'adéquation et l'acceptabilité n'est pas une dualité nette, mais un rapport de type graduel qui peut être décrit comme une bande de fluctuation où le traducteur prend les décisions : les choix de traduction répondent toujours à des motivations diverses et, face à un même écueil, les traducteurs peuvent accorder la priorité à l'adéquation au détriment de l'acceptabilité ou inversement.
Quand les traducteurs mettent en place des stratégies non littérales, ils font ressortir les liens entre leurs représentations cognitives et les traits sémantiques qu'ils perçoivent dans le texte. En même temps, ils rendent compte de leur perception des divergences culturelles ; dans notre corpus, ces divergences sont liées au genre discursif et à la tradition journalistique. La richesse et la variété des stratégies de traduction cristallisées au corpus sont un reflet de la traduction conçue comme un rencontre et une tension entre deux cultures, deux visions du monde et deux traditions journalistiques différentes.
Notes
1. Le corpus regroupe 179 titres publiés dans les numéros 538-546 (1999) et 586-587 (2003) du Monde diplomatique et leurs traductions parues dans les numéros 39-47 (1999) et 87-88 (2003) de l'édition espagnole.
2. Pour une analyse exhaustive de la version espagnole du Monde diplomatique, nous renvoyons à l'excellent étude de Carmen Cortés et Isabel Turci : cortés Zaborras, c. et Turci Domingo, I. (2005) : « La edición española de Le Monde diplomatique », Cortés Zaborras, C. et Hernández Guerrero, M. J. (coords.) : La traducción periodística. Cuenca: Ediciones Universidad de Castilla-La Mancha/Grupo de Investigación Traductología (Col. Escuela de Traductores de Toledo, 14), pp. 289-376.
Références bibliographiques
Adam, J.-M. (1990) : Éléments de linguistique textuelle. Théorie et pratique de l'analyse textuelle, Liège : Mardaga.
Casasús, J. M. et Nuñez, L. (1991) : Estilo y géneros periodísticos, Barcelone: Ariel.
Catach, N. (1994) : La ponctuation, Paris : PUF.
Cortés Zaborras, C. et Hernández Guerrero, M. J. (coord.) (2005) : La traducción periodística, Cuenca : Ediciones Universidad de Castilla-La Mancha/Grupo de Investigación Traductología (Col. Escuela de Traductores de Toledo, 14).
Cortés Zaborras, C. et Turci Domingo, I. (2005) : « La edición española de Le Monde Diplomatique », cortés Zaborras, C. et Hernández Guerrero, M. J. (coord.) : La traducción periodística. Cuenca : Ediciones Universidad de Castilla-La Mancha/Grupo de Investigación Traductología (Col. Escuela de Traductores de Toledo, 14), pp. 289-376.
Cunillera Domènech, M. (2004) : Marcas cohesivas y construcción del sentido: análisis y comparación de estrategias traductoras, Thèse de doctorat, Barcelone : Institut Universitari de Lingüística Aplicada. Serie Tesis, nº 8.
Dijk, T. A. van (1988) : News as Discourse, New Jersey et Londres: Lawrence Erlbaum Ass.
Escandell Cidal, M. V. (1984) : « La interrogación retórica », Dicenda 3, pp. 9-37.
Fernández, L. et Lorda, C. U. (1999) : « La structure rhétorique d'un genre du discours journalistique », Sierra, F. et Hernández, C. (éds.) : Las lenguas en la Europa Comunitaria. Diálogos Hispánicos 23, pp. 559-573.
Gómez Mompart, J. L. (1982) : Los titulares de prensa, Barcelone : Mitre.
Gomis, Ll. (1989) : Teoria dels gèneres periodístics. Barcelone : Generalitat de Catalunya.
Hernández Guerrero, M. J. (2004) : « La traducción de los titulares periodísticos », Suso López, J. et López Carrillo, R. (coord.) : Le Français face aux défis actuels. Histoire, langue et culture, Granade : Universidad de Granada-APFUE/GILEC, pp. 271-281.
Leuven-Zwart, K. van (1989) : « Translation and Original: Similarities and Dissimilarities », Target 1:2, Amsterdam: John Benjamins, pp. 151-181.
Nord, C. (1991) : « Scopos, Loyalty and Translation Conventions », Target 3:1, Amsterdam : John Benjamins, pp. 91-109.
Nord, C. (1998) : « La unidad de traducción en el enfoque funcionalista », Quaderns. Revista de Traducció 1, pp. 65-77.
Santamaría, L. (1990) : El comentario periodístico. Los géneros persuasivos, Madrid : Paraninfo.
Toury, G. (1995) : Descriptive Translation Studies and Beyond, Amsterdam : John Benjamins.
Tricás, M. (1995) : Manual de traducción francés-castellano, Barcelone : Gedisa.
Tricás, M. (2002): « Del universo de creencias al texto. Reflexiones sobre estrategias interpretativas en la construcción del sentido », Álvarez, R. (éd.): Cartografías de la traducción. Del post-estructuralismo al multiculturalismo, Salamanca : Almar, pp. 279-297.